La naissance de l’Église

La création de l’Église résulte d’abord d’une annonce faite par le Christ Lui-même. L’Esprit Saint vient toujours confirmer dans les faits ce que le Fils annonce. Le Christ avait annoncé à Pierre, lorsque ce dernier avait proclamé sa foi en la divinité du Christ : « Tu es Pierre et, sur cette pierre [cette pierre de la foi en la divinité], Je bâtirai mon Église »[1]. Cependant, c’est là l’aspect subjectif, cette foi est la condition de la naissance de l’Église. C’est encore un futur. Le Christ a commencé à la bâtir le jour où Il a accompli sa promesse d’envoyer le Consolateur. À la Pentecôte, lorsqu’Il envoie sa Parole par son Saint Esprit sur tous ceux rassemblés en son nom, croyant en Lui, cette assemblée de croyants devient Église, c’est-à-dire lieu de la présence de la Parole.

Une assemblée de croyants

Pour constituer une Église, il est nécessaire qu’il y ait des hommes de foi qui se rassemblent. Or, justement, le jour de la Pentecôte, les disciples se rassemblent avec foi, d’un seul cœur, au nom du Seigneur Jésus. Ils sont rassemblés en Église, mais ils sont encore rassemblés en tant qu’hommes, au nom de Jésus, avec son souvenir. Ce n’est qu’une organisation humaine. Et puis voilà que le Seigneur Jésus leur envoie Celui qu’Il leur avait promis, Dieu Lui-même en la Personne du Saint Esprit, qui descend sur l’Église rassemblée en même temps que sur chacun de ses membres.

Le Saint Esprit descend alors que les apôtres et la Vierge Marie sont tous rassemblés « d’un seul cœur »[2] – le mot grec est omothymadon. Ils sont « en Église » lorsque le Saint Esprit descend sur eux et pourtant Il descend sur chacun d’eux personnellement. Le don du Saint Esprit est à la fois personnel - chacun en est conscient - et en Église. Ceci est un élément extrêmement important : le don du Saint Esprit n’est pas individuel, mais personnel. « Individu », en grec, se dit atomo. Ce mot fait penser à l’atome, qui est une entité fermée. L’homme, à l’image de Dieu, n’est pas une entité fermée. À l’image du Dieu trinitaire, il est une personne appelée à communiquer avec d’autres personnes. Il n’est vraiment lui-même qu’en relation avec les autres. L’homme n’est vraiment lui-même qu’en relation avec ses frères dans l’Église.

Notons que les disciples présents le jour de la Pentecôte étaient des juifs, de même que les trois mille personnes qui furent baptisées ce jour-là, après la prédication de Pierre, lorsque il sortit du cénacle. La première Église, celle des dix-sept premières années de l’histoire de l’Église, était composée de juifs, ce que le prophète Isaïe appelait à l’avance le petit reste fidèle d’Israël.

L’Esprit vient donc sur des personnes rassemblées, elle sont ensemble et cependant l’Esprit va descendre sur chacune. Ensemble elles constituent l’Église car « église » veut dire « assemblée ». L’Esprit descend sur chacun, vivant en relation avec les autres. Le Saint Esprit crée la communion, Il circule entre nous, nous remettant en communion les uns avec les autres et chacun avec le Christ. On pourrait dire qu’Il fait communiquer chacun avec le Christ et, à travers Lui, avec tous les autres. Il est l’Esprit de vérité, donc Il nous fait communier à la Vérité, c’est-à-dire au Christ, et, à travers Lui, avec chacun de nous. C’est un peu comme des lampes qui se communiquent entre elles le courant du générateur. Le Saint Esprit est ce grand courant qui passe à travers chacun pour nous unir au Christ et les uns aux autres. En même temps, Il est un don personnel, une présence non seulement au milieu de l’assemblée mais dans le cœur de chacun. Il est Dieu, donné à chacun à l’intérieur de l’Église.

C’est lorsque l’Esprit descend sur l’Église et sur chacun de ses membres que ses membres s’épanouissent vraiment en personnes, à l’image des Personnes divines, c’est-à-dire qu’elles sont unies au sein d’un seul Christ et cependant chacune conserve, développe, épanouit sa personnalité propre. Chacun est différent sans être confondu avec les autres. On forme ainsi une communauté unie dans l’amour. De même que les Personnes divines sont unies en un seul amour, en un seul Dieu, de même les membres de l’Église tendent à être unis en une seule Église. Le Saint Esprit est donc un don personnel, pour chacun, mais qui est reçu en Église, lorsque nous sommes unis à la Parole du Fils. Il ne s’agit donc pas d’un illuminisme individuel, mais d’un don ecclésial, dont l’objectivité est garantie par le critère de la Parole de Dieu présente dans l’Église.

La Personne du Consolateur

Dans le texte grec, le Consolateur et le pronom relatif « qui » procède du Père sont un accusatif masculin, alors que le mot « esprit » en grec est neutre. Cela signifie que, lorsque l’Évangile de saint Jean nous parle du Saint Esprit, il ne s’agit pas de l’Esprit de Dieu au sens où nous pouvons parler de l’esprit de telle ou telle personne, de quelque chose, mais il s’agit de Quelqu’un. Il s’agit de la Personne du Saint Esprit, formellement identifiée comme une Personne. C’est la différence entre l’Esprit dans l’Ancien Testament et l’Esprit dans le Nouveau.

Le fait que l’Esprit Saint est Quelqu’un n’apparaît pas clairement dans l’Ancienne Alliance. Il est souvent question de l’Esprit, dans l’Ancien Testament, déjà dans le récit de la création, où l’Esprit de Dieu planait sur les eaux[3], dans le psaume 50 : « Ne me prive pas de ton Esprit Saint » ; cependant, même lorsque Samuel déverse l’huile pour l’onction de David et que l’Esprit Saint descend sur ce dernier, lorsqu’Il descend sur Saül et lui donne l’esprit de prophétie, il n’est pas encore clair qu’il s’agit d’une Personne et non pas simplement de l’Esprit de Dieu.

Cependant, dans l’Évangile de Jean, lorsque Jésus, la veille de sa mort, promet l’envoi du Saint Esprit, il s’agit bel et bien d’une Personne. « Il convient que je m’en aille, car sinon le Consolateur ne viendrait pas. »

Voyez certains moments privilégiés de la vie où l’on touche à l’essentiel et où l’on tente ensuite de le réaliser : cela réconforte. C’est pourquoi le Christ a donné à l’Esprit le titre de Consolateur. Non seulement Il nous console du fait que le Christ est remonté à la droite du Père, mais Il nous console de tout isolement, de toute angoisse et nous accorde cette chaleur de la présence de Dieu, en même temps que de la communion avec les frères.

Notes

[1] Mt 16, 18

[2] Ac 1, 14

[3] Gn 1, 2