Tous les Saints 1er dimanche après la Pentecôte

Catéchèse du père Marc-Antoine

  1. mémoire et glorification de tous les saints de tous les temps et de tous les lieux : à sa place traditionnelle (en Occident également autrefois) au premier dimanche après la Pentecôte (glorieuse descente de l’Esprit sur les apôtres et les disciples, glorification de la sainte Trinité), parce que la sainteté des baptisés est le fruit de l’œuvre conjointe du Verbe incarné et de l’Esprit issu du Père.
  2. la sainteté (« déification », « divinisation ») est le but normal de la vie chrétienne, perfection du baptême. Elle consiste dans l’appropriation, par la grâce de l’Esprit, par une personne (hypostase) créée, de l’humanité déifiée du Christ. Elle accomplit un processus de lutte spirituelle (rupture avec le Malin et ses illusions, et avec l’esprit du monde) ; elle couronne tout l’effort ascétique des chrétiens.
  3. le type de la sainteté chrétienne est la Mère de Dieu, au manteau pourpre. Conçue par ses parents « dans le péché » ancestral, elle se garda depuis la première enfance de tout péché personnel ; elle fut purifiée du péché adamique par l’œuvre conjointe du Verbe et de l’Esprit dans l’Incarnation (25 mars) ; la douleur de l’enfantement lui fut épargnée, signe qu’elle était libérée des conséquences héréditaires du péché ; elle connut la souffrance sans péché ni passion de la compassion pour son Fils et son Dieu, le Christ ; elle connut la mort et la résurrection, anticipant la Résurrection universelle au Dernier Jour ; elle ne passa pas en jugement et fut glorifiée (exaltée, élevée) par le Christ Lui-même (icône de la Dormition). Du Paradis, elle intercède pour les croyants et pour la protection du monde entier.
  4. tout chrétien, en vertu de la grâce du saint baptême et de la communion au Corps et au Sang précieux de Dieu, peut se garder du péché, s’ouvrir à l’illumination de son âme et de son corps par l’Esprit, être uni intimement au Christ, et exercer le ministère normal de témoignage et d’intercession pour le salut du monde entier. La sainteté est donc la raison d’être du baptême et de toute la vie en Christ en ce monde. La fête de ce jour le rappelle et constitue un encouragement et un appel pour chacun !

Lecture de l’épître du saint apôtre Paul aux Hébreux

(Hb XI,33-XII,2)

Frères, c’est par la foi que les saints vainquirent des royaumes, exercèrent la justice, obtinrent des promesses, fermèrent la gueule des lions, éteignirent la puissance du feu, échappèrent au tranchant de l’épée, guérirent de leurs maladies, furent vaillants à la guerre, mirent en fuite des armées étrangères. Certains ressucitèrent pour des femmes leur enfant mort ; d’autres furent livrés aux tourments, et n’acceptèrent point de délivrance, afin d’obtenir une meilleure résurrection ; d’autres subirent les moqueries et le fouet, les chaînes et la prison ; ils furent lapidés, sciés, torturés, ils moururent tués par l’épée, ils allèrent çà et là vêtus de peaux de brebis et de peaux de chèvres, dénués de tout, persécutés, maltraités, eux dont le monde n’était pas digne, errants dans les déserts et les montagnes, dans les cavernes et les antres de la terre. Tous ceux-là, à la foi desquels il a été rendu témoignage, n’ont pas obtenu ce qui leur était promis, Dieu ayant en vue quelque chose de meilleur pour nous, afin qu’ils ne parvinssent pas sans nous à la perfection.
Nous donc aussi, puisque nous sommes environnés d’une si grande nuée de témoins, rejetons tout fardeau, et d’abord le péché qui nous entrave si facilement, et courons avec persévérance l’épreuve qui nous est proposée, ayant les regards sur Jésus, qui est à l’origine de notre foi et qui la mène à son ultime perfection.

Lecture de l’Évangile selon Saint Matthieu

(Mt X,32-33,37-38,XIX,27-30)

En ce temps-là, Jésus déclara : « En vérité, je vous le dis, quiconque me confessera devant les hommes, je le confesserai aussi devant mon Père qui est dans les cieux ; mais quiconque me reniera devant les hommes, je le renierai aussi devant mon Père qui est dans les cieux. Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. Car je suis venu mettre la division entre l’homme et son père, entre la fille et sa mère, entre la belle-fille et sa belle-mère ; et l’homme aura pour ennemis les gens de sa maison. »
Pierre, prenant alors la parole, lui dit : « Voici, nous avons tout quitté, et nous t’avons suivi ; qu’en sera-t-il pour nous ? » Jésus leur répondit : « Je vous le dis en vérité, quand le Fils de l’homme, au renouvellement de toutes choses, sera assis sur le trône de sa gloire, vous qui m’avez suivi, vous serez de même assis sur douze trônes, et vous jugerez les douze tribus d’Israël. Et quiconque aura quitté, à cause de mon nom, ses frères, ou ses soeurs, ou son père, ou sa mère, ou sa femme, ou ses enfants, ou ses terres, ou ses maisons, recevra le centuple, et héritera la vie éternelle. Plusieurs des premiers seront les derniers, et plusieurs des derniers seront les premiers. »

Homélie[1]

La Mère de Dieu et les Saints dont nous célébrons la mémoire aujourd’hui, ceux que nous connaissons car Dieu nous les a révélés et qu’ils ont été compris et reconnus par leurs contemporains ou peut-être des siècles plus tard, tous sont la réponse de la terre à l’amour de Dieu. Et ils donnent cette réponse en leur propre nom mais aussi au nom de toute la création et en notre nom ; car chacun de nous a le privilège d’être appelé d’un nom, notre nom chrétien, le nom de l’un de ces Saints. Et les Saints dont nous portons le nom se tiennent devant Dieu et prient que leur nom ne soit pas indigne aux yeux du Seigneur… Les Saints de Dieu embrassent la création toute entière dans leur amour, dans leur intercession, dans leur prière et dans leur présence continuelle.

Quelle merveille d’appartenir à cette immense famille d’hommes, de femmes, d’enfants qui ont compris le message du Seigneur qui est venu, a vécu, a enseigné et est mort pour nous ! Ils ont répondu de tout leur cœur, ils ont compris avec leur esprit et ils ont accepté Son message avec la détermination d’éliminer en eux-mêmes tout ce qui a occasionné la crucifixion, parce que si une seule personne sur la terre s’était égarée, tombée loin de Dieu, le Christ serait venu la sauver au prix de Sa vie. Voici Son témoignage à un Saint des premiers siècles qui priait que les pécheurs soient confondus, Il lui apparut et lui dit : « Ne prie jamais ainsi ! S’il n’existait qu’un seul pécheur, Je serai mort pour lui »…

Les Saints sont ceux qui ont répondu à l’amour par l’amour, ceux qui réalisent que si quelqu’un peut mourir pour eux, la seule réponse de leur reconnaissance est de devenir tels que celui-ci n’est pas mort pour rien. Prendre sa croix veut dire exactement ceci : se détourner de tout ce qui a provoqué la crucifixion et la mort du Christ, le manque de compréhension et la haine qui L’entouraient. Nous sommes libres de le faire aussi, encore plus que ceux qui vivaient de son temps, car ils ont pu se tromper à son sujet en ces jours-là ; mais de nos jours, deux mille ans après, quand nous lisons les Évangiles, et que nous voyons émerger la puissance du Christ, et que nous avons des millions de témoins qui nous disent qu’Il a vraiment donné Sa vie pour nous et que la seule réponse que nous pouvons faire est de donner notre vie pour les autres en Son Nom – Peut-on ne pas répondre ?

Aujourd’hui donc, prenons un nouveau départ : en écoutant comme ils ont écouté, avec tout leur cœur, leur esprit et leur volonté, de tout leur être pour voir ce qui arrivait, pour entendre ce qu’il disait, pour répondre avec détermination et reconnaissance. Et alors, si nous offrons ce tout petit peu à Dieu –notre reconnaissance et notre bonne volonté– le Seigneur nous donnera la force, le pouvoir de grandir jusqu’à la stature qu’il veut et qu’il rêve pour nous. Comme Il l’a dit : « Ma puissance se déploie dans la faiblesse, Ma grâce te suffit »[2]… Et Paul, qui savait bien cela ajoute dans un autre passage « Tout nous est possible dans la puissance du Christ Qui nous soutient »… Il n’y a pas de doute, nous le pouvons si seulement nous laissons le Seigneur nous sauver et nous porter de la terre au ciel.

Prenons un nouveau départ, de sorte que les Saints dont nous portons le nom puissent se réjouir en nous, que la Mère de Dieu qui a donné Son Fils à la mort pour que nous puissions répondre, comprendre et être sauvés, se réjouisse et que le Christ puisse voir que ce n’est pas en vain qu’Il a vécu, enseigné et est mort. Soyons Sa gloire, une lumière – une petite lumière, comme une petite bougie, ou une lumière éclatante comme celle des grands Saints – mais soyons une lumière qui éclaire le monde et en diminue les ténèbres !

Soyons la joie pour que les autres puissent apprendre à se réjouir dans le Seigneur.

Amen

Notes

[1] Prononcée par le métropolite Antoine au cours de la liturgie diocésaine le 25 juin 1989 à Londres

[2] 2-Cor. XII, 9