Entrée de notre Seigneur à Jérusalem

Textes du triode

Tropaire – ton 1

Confirmant la Résurrection commune * avant Ta Passion, Christ, Dieu, Tu as relevé Lazare des morts * Et nous, portant comme les enfants les signes de la victoire * Dieu qui as vaincu la mort, nous Te disons * Hosanna au plus haut des cieux * Béni est Celui qui vient au Nom du Seigneur.

Kondakion – ton 6

Ô Christ, Dieu sur le Trône dans le ciel * et porté par un petit âne sur la terre * Tu as reçu la louange des Anges et la célébration des enfants qui Te disent * Tu es béni, Toi qui viens rappeler Adam.

Ikos

Immortel Tu as lié l’enfer, Tu as détruit la mort, Tu as ressuscité le monde. Et les enfants Te célèbrent avec des rameaux, ô Christ, ils proclament aujourd’hui Ta victoire : Hosanna au Fils de David. Ils disent que les enfants ne seront plus immolés pour le Fils de Marie. C’est Toi Seul qui seras crucifié pour tous les enfants et les anciens. Le glaive n’avancera plus sur nous. C’est Ton côté qui sera percé par la lance. Et nous Te disons dans la joie : Tu es béni, Toi qui viens rappeler Adam.

Stichères des Laudes – Ton 4

Seigneur, beaucoup étendaient sur la route leurs vêtements * D’autres coupaient les rameaux des arbres et les portaient * Ceux qui Te précédaient et ceux qui Te suivaient chantaient * Hosanna au Fils de David * Béni est Celui qui est venu et qui revient, au Nom du Seigneur. (bis)

Tu allais entrer dans la cité sainte, Seigneur * Le peuple portait les rameaux des plantes * et célébrait en Toi le Maître de l’univers * Comme s’il Te contemplait sur les Chérubins * il Te voyait porté sur un petit âne et chantait * Hosanna au Fils de David * Béni est Celui qui est venu et qui revient, au Nom du Seigneur. (bis)

Sortez, nations, sortez, peuples * Voyez le Roi des cieux entrer aujourd’hui dans Jérusalem * sur un simple petit âne comme sur un Trône élevé * Race des Juifs infidèle et adultère * Venez voir Celui que vit Isaïe * Il est venu pour nous dans la chair * Il épouse en sa sagesse la nouvelle Sion * Il rejette la synagogue condamnée * A ces noces pures les enfants purs sont venus acclamer * Avec eux célébrons et chantons l’hymne angélique * Hosanna au plus haut des cieux à Celui qui a le grand Amour.

Pour la confirmer à tous, ô Christ, Dieu * Tu as révélé la Résurrection commune avant Ta Passion volontaire * Tu as à Béthanie par Ta puissance ressuscité Lazare mort depuis quatre jours * et Tu as rendu la vue aux aveugles * Sauveur qui donnes la lumière * Puis avec Tes disciples accomplissant les prédictions des prophètes * Tu es entré dans la Cité Sainte * assis sur un petit âne, porté comme sur les Chérubins * Et les enfants des Hébreux avec des rameaux et des palmes sont venus à Ta rencontre * Portant nous aussi les rameaux d’olivier et les palmes nous Te chantons * Hosanna au plus haut des cieux. Béni est Celui qui vient au Nom du Seigneur.

Gloire … Et maintenant … – Ton 6

Six jours avant la Pâque * Jésus vint à Béthanie et ses disciples Lui dirent * Seigneur, où veux-Tu que nous Te préparions le repas de la Pâque ? * Et Lui les envoya * Allez dans le village en face * Vous trouverez un homme portant un vase d’eau * Suivez le et dites au maître de la maison * le Maître dit : Chez toi je ferai la Pâque avec mes disciples.

Lecture de l’épître du saint apôtre Paul aux Philippiens

(Ph IV,4-9)

Frères, réjouissez-vous dans le Seigneur en tout temps ; je vous le répète, réjouissez-vous. Que votre bienveillance soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche. N’entretenez aucun souci, mais en toute circonstance exposez vos requêtes à Dieu, recourant à la prière et l’oraison, dans l’action de grâces. Alors la paix de Dieu, qui surpasse tout esprit, prendra sous sa garde vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus.
En conclusion, mes frères, tout ce qu’il y a de vrai et de noble, tout ce qu’il y a de juste et de pur, tout ce qui est digne d’être aimé et d’être honoré, tout ce qui s’appelle vertu et qui mérite des éloges, voilà ce dont il faut vous préoccuper. Ce que vous avez appris et reçu, ce que vous avez vu et entendu de moi, mettez-le en pratique. Alors le Dieu de la paix sera avec vous.

Lecture de l’Évangile selon Saint Jean

(Jn XII,1-18)

Six jours avant la Pâque, Jésus arriva à Béthanie, où était Lazare, qu’il avait ressuscité des morts. Là, on lui fit un souper ; Marthe servait, et Lazare était un de ceux qui se trouvaient à table avec lui. Marie, ayant pris une livre d’un parfum de nard pur de grand prix, oignit les pieds de Jésus, et elle lui essuya les pieds avec ses cheveux ; et la maison fut remplie de l’odeur du parfum. Un de ses disciples, Judas Iscariot, fils de Simon, celui qui devait le livrer, dit : « Pourquoi n’a-t-on pas vendu ce parfum trois cent deniers, pour les donner aux pauvres ? » Il disait cela, non qu’il se mît en peine des pauvres, mais parce qu’il était voleur, et que, tenant la bourse, il prenait ce qu’on y mettait. Mais Jésus dit : « Laisse-la garder ce parfum pour le jour de ma sépulture. Vous avez toujours les pauvres avec vous, mais vous ne m’avez pas toujours ». Une grande multitude de Juifs apprirent que Jésus était à Béthanie ; et ils y vinrent, non pas seulement à cause de lui, mais aussi pour voir Lazare, qu’il avait ressuscité des morts. Les principaux sacrificateurs délibérèrent de faire mourir aussi Lazare, parce que beaucoup de Juifs se retiraient d’eux à cause de lui, et croyaient en Jésus.
Le lendemain, une foule nombreuse de gens venus à la fête ayant entendu dire que Jésus se rendait à Jérusalem, prirent des branches de palmiers, et allèrent au-devant de lui, en criant : « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le roi d’Israël ! » Jésus trouva un ânon, et s’assit dessus, selon ce qui est écrit : « Ne crains point, fille de Sion ; voici, ton roi vient, assis sur le petit d’une ânesse. » Ses disciples ne comprirent pas d’abord ces choses ; mais, lorsque Jésus eut été glorifié, ils se souvinrent qu’elles étaient écrites de lui, et qu’il les avaient été accomplies à son égard. Tous ceux qui étaient avec Jésus, quand il appela Lazare du sépulcre et le ressuscita des morts, lui rendaient témoignage ; et la foule vint au-devant de lui, parce qu’elle avait appris qu’il avait fait ce miracle.

Homélie[1]

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

Voici le cri de joie des disciples et de la foule à l’entrée de Jésus à Jérusalem. Cri de joie repris directement au Psaume 117, psaume d’allégresse et d’exultation, car psaume prophétique et messianique. Cri de joie expliqué et complété par la suite du psaume : « Le Seigneur est Dieu et Il nous est apparu ; formez un cortège de fête avec des rameaux de feuillage ».

Nous voici bien au cœur de la Fête des Rameaux, fête qui magnifie la foi d’Israël dans la venue de l’envoyé du Seigneur. Espérance impérissable du peuple de Dieu ; attente indestructible d’Israël. Tous étaient dans l’attente du Messie, de l’Oint du Seigneur, pour que s’instaure, une fois pour toutes, le règne et la paix du Seigneur. Espérance aux sentiments mêlés de restauration nationale et d’institution d’une paix universelle autour de Jérusalem. Espérance entretenue depuis plus d’un millénaire, dans une foi toujours renouvelée au Seigneur, au Très-Haut, au Dieu d’Israël et de toute la terre.

Le psalmiste voit venir ce Jour du Seigneur : « Dites parmi les nations : le Seigneur a établi son Royaume ; que les Cieux se réjouissent et que la terre exulte […] devant la face de Dieu. Car Il vient ; Il vient pour juger la terre ; Il jugera l’univers avec justice et les peuples selon Sa vérité. »

Sur cet arrière-fond de Jugement dernier, le Seigneur vient dans la personne de son élu, de son Serviteur à qui a été remis toute justice. L’évidence messianique éclate en ce Jour et soulève aux yeux de tous, disciples et population, un enthousiasme irrépressible.

La venue de Jésus surpasse même l’espérance d’Isaïe : « Ah ! si Tu déchirais les Cieux et si Tu descendais ! ». De toute éternité le Fils de Dieu, le Verbe de Dieu avait résolu de venir des Cieux parmi nous pour notre salut. De toute éternité Jésus est pour nous et pour toute la Création « Celui qui vient au Nom du Seigneur ». Le temps de la première et ancienne Alliance avait été celui de la préparation. À Bethléem est venu celui de la réalisation.

Mais venue jusqu’alors ignorée du peuple de Dieu, sinon des puissances malignes avec lesquelles pactisaient Hérode et le désordre du monde. Ce sont les puissances malignes qui révélèrent en premier la présence en personne de Dieu parmi nous : « Tu es le Saint de Dieu, le Fils de Dieu », s’écriaient-elles.

Cependant le saint vieillard Syméon avait vu dans l’enfant de Marie la Gloire d’Israël, le salut et la Lumière de tous les peuples, venu pour éclairer toutes les nations. Saint Jean-Baptiste ensuite avait préparé la voie de Celui qui venait après lui, mais qui était plus grand que lui, Celui dont il proclamera : « J’ai vu et j’atteste que Celui-ci est le Fils de Dieu ».

Toute sa vie Jésus se manifeste comme Celui qui vient au Nom du Seigneur. Si, au jour des Rameaux l’évidence s’impose, ce n’est pas que Jésus ne l’ait annoncé à de nombreuses reprises et sans détour. Tout l’Évangile de saint Jean en témoigne : « Je suis venu au Nom de mon Père… Je ne suis pas venu de moi-même ». Jésus est venu pour faire les œuvres que Son Père Lui dit de faire : Il est la Parole venue du Ciel pour donner la vie au monde. Cette venue de Jésus s’affirme et achève de se révéler le jour des Rameaux. La foule témoigne par ses « hosanna ». Mais Jésus dit à Ses disciples : « Maintenant mon âme est troublée, et que dire ? Père, sauve-moi de cette Heure. Mais c’est pour cette Heure que Je suis venu. Père, glorifie Ton Nom. »

En quelques mots saint Jean résume l’angoisse de Jésus à Gethsémani, Son angoisse, mais Sa volonté irréductible d’accomplir la volonté de Son Père pour notre salut commun. Quand Jésus vient au milieu de la liesse des Rameaux, Il sait qu’Il vient d’entrer pour nous dans Sa Passion Glorieuse, pour nous délivrer une fois pour toutes de la mort par Sa propre mort. Les rameaux agités par la foule ne sont pas simple signe de joie. Les rameaux, dans la tradition juive, sont déjà les signes avant-coureurs des temps derniers. Jésus avait déjà prévenu les siens de l’échéance de Sa mort avant son retour à la fin des temps : « Je vous le dis, vous ne me verrez plus désormais que vous ne disiez : Béni soit Celui qui vient au Nom du Seigneur ». Implicitement, en fêtant avec des palmes le Messie qui vient, la foule annonce la Passion et la mort de Jésus, et Sa nouvelle venue parmi nous dans le nouvel éon du Royaume, retour de Celui qui est, qui était et qui vient.

C’est pourquoi l’Église s’est saisie de ce Psaume 117 au cœur de la Sainte Liturgie. À la Petite Entrée, comme entrée du Seigneur qui vient dans sa Parole. À la Grande Entrée, qui reproduit la Fête des Rameaux, comme entrée du Seigneur vers Sa Passion et Sa mort, sous les signes du pain et du vin. Et surtout dans la Prière eucharistique, quand nous unissons dans une même doxologie le Benedictus adressé au Fils au Sanctus adressé au Père. Dès lors le Christ est Celui qui vient réellement dans les éléments sanctifiés par l’Esprit, anticipant pour nous le banquet messianique du Royaume.

Toute cette liturgie des Rameaux est à bien saisir. Mais elle ne sert de rien, si Jésus n’est pas aussi pour chacun de nous, pris personnellement, ici et maintenant comme on dit, Celui qui vient, qui ne cesse de venir à nous. Certes, Jésus ne vient pas dans le fracas de l’évidence. Il est dans le souffle léger de l’Esprit. Avec le Père Il est comme une eau murmurante qui appelle. Plus encore Jésus vient à nous dans ceux qui nous entourent, ceux que nous aimons et ceux que nous n’aimons pas, ceux qui nous aiment et ceux qui ne nous aiment pas. Jésus vient toujours dans l’imprévu et l’inattendu, comme Il est aussi toujours présent dans le quotidien le plus ordinaire. Pour autant, quelque effacée que semble la présence de Jésus, elle est toujours une présence personnelle, réelle, concrète et perceptible : « Je me tiens à la porte et Je frappe ; si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, J’entrerai chez lui pour souper, Moi près de lui, lui près de Moi. »

Cette venue de Jésus est pour tous. Et nous, qui avons reçu l’onction baptismale, nous sommes devenus des petits Christ, disent les Pères. Il nous faut à notre tour, pour ceux qui sont encore dans le désir et l’attente, être de ceux qui viennent au Nom du Seigneur. Car, comme le Père a envoyé Son Fils dans le monde, de même Celui-ci nous envoie au-devant des autres.

Ne retirons donc jamais notre regard ni notre espérance de Celui qui vient pour tous. Plus que jamais, veillons et attendons. Pour cela il nous faut garder un cœur brûlant à la pensée de Celui qui vient. Il faut que tout ce qui nous parle de Jésus - et tout nous parle de Jésus, d’où que cela vienne - il faut que cela nous fasse battre le cœur, dans un désir et une attente inépuisables et toujours comblés. Aujourd’hui, attente de l’Époux qui vient. Demain, venue du Roi du monde, dans la lumière glorieuse de Pâques. « Oh, oui, viens Seigneur Jésus, viens ! ».

Amen !

Note

[1] Homélie prononcée à la Crypte par le Père René le 12 avril 1998